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Lalee

             Alors que Lalee se dirigeait vers son dortoir, en quête de retrouver le confort d’un lit, sa tête bourdonnait de questions. Depuis ses dernières péripéties, elle ne cessait de se remettre en questions. Pourquoi était-elle là ? La réponse pouvait être limpide : elle n’avait pas eu le choix. Cependant, elle n’était pas une guerrière ou un soldat d’élite. Alors, comment pouvait-elle atteindre son but sans y laisser la vie ? La jeune fille n’avait jamais eu de véritables dilemmes si ce n’est lorsqu’elle devait choisir un jouet pour Sonnie. S’entrainer, apprendre avec assiduité, étaient nouveaux pour elle. Elle n’était qu’une Résistante parmi tant d’autres ici : en bas de l’échelle. Tout lui manquait pour se démarquer : l’intelligence, la stratégie, le sang-froid et l’objectivité. Sans doute fallait-il qu’elle commence à prendre assez de recule pour se donner entièrement à la cause. La vengeance restait le fruit mûr dans lequel elle désirait croquer à pleines dents mais se battre pour la liberté individuelle et celle des familles, comme la sienne, en était le pommier. Elle devait gravir la hauteur de cet idéal pour en saisir le fruit. Il lui restait tant de chemins à faire encore… Cette pensée lui arracha un profond soupire. Devenir responsable, c’est plus difficile qu’il n’y parait.

 

            Devant la porte du dortoir 104, elle hésita quelques secondes, les doigts autour de la poignée. Lalee n’y songeait que devant le fait accomplis : elle allait affronter, pour la première fois, une réelle proximité avec d’autres résistantes. Depuis son arrivée, elle n’avait adressé la parole qu’aux Turner, au Docteur Bayn et aux membres du Comité. Sa prise sur le loquet se raffermit et ses iris ambrés luisirent de détermination. Elle ignorait à quelles figures de Résistants elle aurait affaire ; il était hors de question qu’elle montre un quelconque signe de faiblesse où s’en serait finis d’elle. ‘Lee ouvrit la porte avec fermeté.

 

          Dans la pièce se trouvaient trois lits de quatre couchettes superposées. Pour la plupart, à leurs pieds, s’entassaient des sacs de voyages en épais tissus et de couleur terre. Lalee repéra, sous les amas de vêtements qui en dégoulinaient, des crosses luisantes ou des canons d’armes rutilants. En s’avançant, son pied buta dans une douille qui roula pour en rejoindre un autre tas à l’abandon. Rien n’était rangé, parfaitement ordonné. La jeune fille se fit bousculer brusquement. Surprise, elle se décala de plus belle pour laisser passer les autres résidentes. Comme une idiote, elle s’était figée en plein milieu de l’entrée. Les onze femmes qui investirent la pièce étaient toutes, sans exception, plus âgées qu’elle. Elle se recula dans un coin, scrutant les visages trentenaires ou d’une vingtaine d’années se chamailler ou rire. Lalee se sentit mal à l’aise. Elle avait beau être une femme, être entourée de personnes du même sexe ne lui plaisait pas ; comme si elle n’était pas à sa place. La jeune fille attendit que les couchettes s’emplissent pour repérer celle qui resterait disponible. L’apercevant – une couchette superposée, dans le fond – elle la rejoignit au pas de course tout en se délestant de sa ceinture munis de son Holster et autres « babioles Â», selon elle, pour la jeter sur le lit d’un souple mouvement du bras. Gênée d’enlever ses rangers devant les autres, elle se contenta de grimper l’échelle. Durant son ascension, des doigts s’enroulèrent autour de sa cheville et tirèrent d’un coup sec. ‘Lee se raccrocha à un échelon et baissa le regard, sourcils froncés. Une femme, blonde et massive, haute d’un bon mètre quatre-vingt la toisait de ses yeux enfoncés dans leurs orbites. ‘Lee s’apprêtait à lui demander gentiment de lâcher prise mais reconnut la désagréable résistante de la veille, dans le gymnase.

 

  • On ne t’a jamais appris la politesse ?, l’agressa Britt, La moindre des choses lorsque tu débarques dans un dortoir est de saluer et te présenter.

  • Bonjour. Lalee., répondit l’interpellée, peu encline à gangréner une altercation qui finirait en crêpage de chignon.

 

Il y eut quelques rires moqueurs, des hoquets outrés et les éclairs dans le regard globuleux de Britt.

 

  • Hé !, s’exclama soudain l’insolente blonde, Je te reconnais, toi ! Tu es la nouvelle recrue !

 

Lalee avait prié pour qu’elle ne la reconnaisse pas. Apparemment, ce fut chose vaine. Elle sut instantanément qu’avec cette fille dans les parages, elle ne trouverait pas le repos. Avant que Britt ne crache son venin, ‘Lee se dégagea prestement de sa poigne et se réfugia rapidement sous sa couverture, en oubliant de délasser ses chaussures. Elle avait bien assez de problèmes comme ça ; inutile qu’on ne lui en rajoute.

                Au bout d’une bonne heure à quêter le sommeil, ‘Lee commença à remuer sans faire de bruits par crainte de s’attiser les foudres de ses congénères. Toutefois, un bruit assourdissant la fit bondir sur son matelas. Aigu, trop fort, douloureux. Lalee ne parvenait même plus à s’entendre penser. Les autres s’étaient redressées en vitesse et se jeter sur leurs vêtements. Suivant la cohue, la jeune fille sauta de son lit, atterrissant sur ses jambes encore courbaturées. Elle n’avait enlevé que sa ceinture avant de se coucher. S’apercevant qu’elle était la dernière, elle s’empressa de sortir en se contorsionnant dans tous les sens pour ceinturer sa taille. Des haut-parleurs crachotaient dans les couloirs, grésillant :

 

Tous les membres sont priés de se rendre dans la Salle Principale. Merci de rejoindre votre Instructeur qui vous y attend. Nous répétons : Tous les membres sont priés de se rendre dans la Salle Principale. Merci de rejoindre votre Instructeur qui vous y attend.

 

Maintes fois, les résistants, affolés, heurtaient les épaules de Lalee qui tournait sur elle-même pour s’y retrouver. Que se passait-il ? Etait-ce un entrainement ? Au vu des airs graves ou paniqués des autres, elle sentit son cÅ“ur se serrer à l’idée qu’une chose grave s’était produite. Elle blêmit en se demandant si le QG ne subissait pas une attaque. Accélérant, elle descendit dans la Grande Salle. La masse humaine criait, prise dans des débats et des suppositions qui incendièrent les tympans de la jeune fille dès qu’elle plongea à l’intérieur, retenant son souffle comme en apnée. Elle devait impérativement repérer Cole. Mais dans cette foule, c’était peine perdue. Elle tenta de demander autour d’elle si quelqu’un l’avait vu mais personne ne lui répondit, trop occupé à se disputer avec un autre. Finalement, Lalee repéra Skill dans un coin. L’adolescent se tenait, bras croisés, contre un mur pour éviter les bousculades. L’œil dur, il ne la remarqua pas tout de suite malgré les grands gestes de ‘Lee. Cette dernière dût jouer des coudes pour le rejoindre et porter sa voix assez loin pour qu’il l’entende. Dès qu’il l’aperçut, Skill perdit son air sombre et lui sourit. Soulagée de ne plus être seule, elle le lui rendit avec chaleur.

 

  • Que se passe-t-il ?, s’enquit-elle à bout de souffle.

  • Difficile à dire., lui répondit-il, C’est plutôt rare de sonner l’alarme. Ca ne signifie jamais rien de bon.

  • Nous sommes attaqués ?, s’inquiéta la jeune fille.

  • Nous ne l’avons pas été. Mais d’autres, oui., lui lança une voix maintenant reconnaissable entre toutes.

 

Lalee tourna la tête vers Cole.

 

  • Je suis désolée mais je ne t’ai pas trouvé dans cette masse., s’excusa-t-elle de but en blanc.

 

Il parut ne même pas l’entendre. Il s’en fichait complètement. A moins qu’il ne lui règle son compte après cette panique générale ? Il fit signe aux deux jeunes gens de le suivre et ils obéirent sans poser de questions. Cole prit tout de même le temps de les informer afin d’amenuiser leur curiosité croissante.

 

  • Un de nos groupuscules nomades a été déniché par la République. Le peu de survivants a réussis à revenir au QG.  

 

De sa voix autoritaire, il ordonna qu’on lui cède le passage. Aucun n’osa l’affronter mais la plupart leur décochèrent des regards plein d’aigreur. Eux aussi voulaient prendre connaissance des rescapés et voir si leurs amis en faisaient partis. Lalee sentit son cÅ“ur s’arrêter net lorsqu’elle les vit : des femmes et des enfants, regroupés les uns contre les autres, encrassés et pleins de suie. Les plus petits restaient soigneusement cachés dans les jupons de leur mère tandis que les plus grands sanglotaient allégrement, essuyant leur nez de leurs manches déchirées. Ils étaient totalement effrayés, sous le choc. Cole sortit de la foule. Les rescapés eurent un mouvement de recule face à cette haute stature et ce visage sombre. Qu’avaient-ils bien pu subir pour être aussi tétanisés par la peur, au point de ne même plus avoir confiance en un Résistant aussi intimidant soit-il ? Lalee les prit en pitié. Un garçon blond sortit la tête, derrière les jambes de sa mère. Il contempla les visages penchés sur les survivants de l’attaque, mue d’une innocence et incompréhension à fendre le cÅ“ur. Il rappela à ‘Lee sa cadette. La jeune fille se pencha en avant, prête à le réconforter d’une étreinte de la main lorsque les membres du Comité forcèrent le passage en fanfare, Binky Bell en tête.

 

  • Que s’est-il passé ?, criait cette dernière de sa voix haut perchée, Qu’on ait des explications, que Diable ! Que vous est-il arrivé ?

 

Les femmes secouèrent la tête, refusant de reparler du massacre. Certaines fondirent en larmes en serrant dans leur giron leur petite progéniture. L’une des membres que Lalee avait rencontrée lors de la Commission dépassa la Secrétaire et tira le col d’une des femmes.

 

  • Ce n’est pas le moment de manquer de courage !, cria-t-elle, furieuse, Nous devons savoir ! Que sont devenus les nôtres ? Pourquoi ? Comment !

 

Butée, traumatisée par ce qu’elle avait vécu, la malmenée refusa de parler comme si ses lèvres avaient été cousues par la terreur. Elle se prit un soufflet magistral qui la renversa, manquant d’écraser son enfant qui hurla. Lalee eut un mouvement de rage, prête à bondir pour s’interposer mais Mlle Bell saisit l’épaule de sa supérieure et la força au calme, devançant la jeune fille qui fulminait entre ses dents serrées. Le Haut-Dirigeant, toujours aussi grassouillet, s’avança dans un geste de réconfort.

 

  • Nous sommes tous heurtés par ce drame. Je vous demande de rester calmes et de ne pas céder à la panique ! (Il se tourna vers les rescapés) Mesdames, je ne puis trouver les mots pour excuser le comportement de Lessie. Je vous prie de comprendre notre volonté de comprendre ce qui s’est passé. Nous devons savoir.

 

La mère du petit garçon blond acquiesça, sûrement à la tête du petit groupe depuis la catastrophe. Lorsqu’elle ouvrit la bouche pour s’adresser au Chef, son enfant trépigna sur place avant de prendre la fuite, courant sur ses petites jambes aussi vite qu’il lui était possible. Sa mère voulut le retenir bien que trop tard.

 

  • Alec !, l’appela-t-elle.

 

Ce devait être trop pour ce garçon : le bruit, le traumatisme, la violence. Ayant suivis la scène, Lalee se fondit dans la foule comme elle le pouvait pour le retrouver, l’arrêter ; le rassurer. La femme tenta de dénouer le nÅ“ud de sa gorge pour s’exprimer, forçant les gens autour d’eux à boire ses prochaines paroles. Skill et Cole en faisant partis, aucun des deux ne remarqua l’éloignement de la jeune fille.

 

  • Je ne sais pas… Je ne sais pas combien ils étaient., bafouilla la jeune mère, Deux… Peut-être plus, je n’arrive pas… je n’arrive pas à me souvenir. Mais deux, ça, j’en suis certaine. Nous ne savons pas comment ils ont pu nous débusquer. Nous étions en route pour rejoindre notre prochaine retraite dans le Nord. (Elle déglutit, en proie aux larmes) Mon mari… Mon mari a essayé de nous protéger, de les faire battre en retraite mais… Mais ils étaient teigneux ! Alors… Alors (elle sanglota) Alors que nous avions réussis à les isoler, je ne sais pas ce qui s’est produit mais… Il y a eu… une explosion. Une horrible explosion. Je n’en avais jamais vu de telle…

  • Des soldats de leur élite, certainement…, comprit le Haut-Dignitaire.

 

Ce dernier se tournait déjà vers ses congénères mais la rescapée s’avança, tordant ses mains dans tous les sens mais son regard flamboyait de haine.

 

  • L’un des deux. Mon mari l’a reconnu., annonça-t-elle d’une voix plus ferme.

 

‘Lee tourna un instant les yeux vers eux, cherchant toujours le petit garçon blond. Elle entraperçut les yeux de la survivante se plonger dans ceux de Cole.

 

  • Il s’appelait Dan.

 

Lalee s’arrêta lors de l’évocation de ce nom maudit. Elle ne sut pourquoi elle s’inquiéta de la réaction de son Instructeur. Trop petite pour bien le voir, elle n’eut d’autres choix que d’abandonner. Après tout, qu’en avait-elle à faire ? Cependant, elle ne remarqua que trop bien la façon dont le jeune homme se contracta, le frémissement de sa lèvre et la veine palpitant à sa tempe. Lalee n’eut aucun mal à percevoir le râle animal se former dans la gorge de Cole. Peu encline à le voir sortir de ses gonds, la jeune fille fit volte-face et continua de chercher le petit garçon. Elle parcourut diverses galeries avant d’entendre un gémissement sortir d’une grande caisse en bois. Elle comprit aussitôt et un sourire rassuré effleura ses lèvres. Elle s’en approcha et jeta un Å“il dans l’intervalle de deux planches. Alec était là, recroquevillé sur lui-même et sanglotant contre ses genoux.

 

  • Coucou !, lança-t-elle de sa voix la plus douce en toquant légèrement.

 

Très vite, il cessa tout bruit prit d’un spasme de frayeur. Il guetta l’intérieur du caisson, inquiet. Le sourire de Lalee s’élargit de plus belle. Sans brusquerie, elle ouvrit le couvercle et se pencha au-dessus. Les petits yeux ronds la dévisagèrent, brillant d’angoisse et de larmes.

 

  • Tu as trouvé une bien jolie cachette., le complimenta-t-elle pour le rassurer.

 

Il s’essaya à reculer mais rencontra la paroi qui l’en empêcha. Délicatement, ‘Lee tendit une main sans se départir de son air chaleureux et réconfortant. Hésitant, Alec se mit debout. Ses jambes étaient couvertes de bleues et d’éraflures. Quand il saisit la main longue de Lalee, celle-ci en ressentit la callosité qu’elle considérait comme propre aux adultes. Tendrement, ressentant une peine sincère pour ce petit, elle le souleva pour le prendre dans ses bras.

 

  • Tu as du être terrifié…, lui murmura-t-elle en lui caressant les cheveux.

 

Elle entreprit de le bercer comme autrefois quand elle consolait Sonnie. Se sentant en sécurité, Alec posa la tête sur l’épaule de la jeune fille et se laissa faire, ne pleurant plus. Encouragée, Lalee chantonna la berceuse de sa mère qu’elle avait écoutée inlassablement, chaque soir au coucher. Une comptine qu’elle pensait vieille comme le monde.

 

  • Repose-toi. Dors mon chat., chantait-elle d’un timbre mélodieux et apaisant, Demain est un nouveau jour ; un beau jour. Un jour joyeux qui t’accueillera. Alors, sois sage ; endors-toi. Endors-toi, mon chat.

 

Les tremblements du petit corps finirent par cesser. Lalee lui caressa de nouveau ses cheveux blonds, se demandant si cet enfant avait un ainé ou une sÅ“ur qui l’avait bercé ainsi. Elle retourna dans la Grande Salle avec le petit endormi dans les bras mais ne dénicha pas sa mère. La jeune fille fronça les sourcils, indignée. Comment n’avait-elle pas pu se mettre à la recherche de son propre enfant ? Quand bien même était-elle en deuil, elle restait une mère. ‘Lee prit la décision d’emporter Alec en lieu sûr, dans l’espoir qu’il passe au moins une nuit paisible. Tant pis pour les conséquences. Pour l’heure, il y avait plus important.

 

             Cole frappa contre un mur, l’impact douloureux ne se reflétant aucunement sur son visage fulminant de haine. Il tremblait ; tout en lui tremblait. Il n’avait plus qu’une envie : retrouver Dan et lui tirer une balle entre les deux yeux.

 

  • Non… Non, c’est trop clément., murmura-t-il, Beaucoup trop. Il mérite de souffrir… !

 

Dan… Il avait encore participé à un massacre. Sans scrupules. Sa colère fit frémir ses nerfs. Cole serrait si fort sa mâchoire que ses dents auraient été susceptibles de se briser. Lui faire payer. Faire payer à son ainé tous les morts qu’il avait laissé dans son sillage ; tout le chagrin et la déception qu’il avait entrainé après son départ, laissant ses cadets seuls, sans espoir. Il souhaitait plus que tout au monde remonter dans le temps, cinq ans en arrière afin de se retrouver de nouveau devant lui et ne plus hésiter à l’achever, malgré la présence de Skill âgé d’à peine douze ans. Dan l’avait mutilé ; il les avait reniés. Le souvenir des flammes brûlant sa chaire fut d’autant plus vivace tandis que Cole revoyait son frère le laissait pour mort, son benjamin terrorisé en entendant son ainé hurler de douleur. Dès lors, il avait fait un serment : se venger.

 

             Après avoir retrouvé son calme, il n’aspirait qu’à se coucher et oublier, le temps d’une nuit, toutes ses sombres pensées. Dans un état second, amorphe et vidé, il grimpa à l’étage et rejoignit sa chambre. Il vit une silhouette devant la porte. Il crut tout d’abord qu’il s’agissait de Skill qui avait encore perdu la clé mais en s’approchant de plus près, il distingua les cheveux auburn et le corps fin de Lalee. Il ralentit, se préparant mentalement à l’affronter. Ce n’est que lorsqu’il fut assez proche pour correctement la voir qu’il remarqua le corps pelotonné contre elle, bercé tendrement. Il reconnut le prénommé Alec.

 

  • Un problème ?, fit-il une fois près d’elle.

 

Lalee lui fit signe de parler moins fort ce qui agaça le jeune homme. Il croisa les bras, prêt à en découdre si elle s’amusait à le provoquer devant sa propre chambre. N’était-ce pas elle, après tout, qui en bloquait l’accès ?

 

  • Je ne retrouve pas sa mère., chuchota-t-elle en s’approchant plus près de lui.

 

Cole, sans pour autant reculer, s’écarta légèrement.

 

  • Et ? En quoi ça me concerne ?

  • Il a besoin d’un endroit où dormir.

  • Et, évidemment, tu as pensé : « Turner est si gentil qu’il acceptera volontiers d’héberger un gosse. Â» Oui, c’est bien connu, ma chambre est un hôtel., grinça-t-il.

 

Lalee fronça les sourcils.

 

  • Tu peux être de mauvaise humeur, je m’en fiche., répliqua-t-elle, Mais je ne peux pas laisser Alec dans mon dortoir. Vous avez une chambre individuelle Skill et toi. Alors, allons ! Un peu de compassion. Je te promets que ce ne sera que pour cette nuit.

  • C’est étrange…, soupira-t-il, J’ai du mal à y croire.

 

Son soupire se prolongea jusqu’à ce qu’il leur ouvre la porte derrière laquelle ‘Lee s’engouffra en glissant sous son bras. Sans lui demander son autorisation, elle borda Alec dans le propre lit de Cole mais ce dernier n’émit aucune objection. Il était bien trop épuisé pour se lancer à corps perdu dans un débat qui n’en finirait pas. Lalee s’agenouilla près du petit garçon, comme si elle craignait qu’il ne se brise en deux dans son sommeil. Turner vit luire sur la joue de la jeune fille une perle de larme. Elle baissa alors la tête, reniflant discrètement. Il comprit que son intérêt pour ce garçon lui venait surtout de sa mélancolie et sa culpabilité. Il lui rappelait tout simplement Sonnie. Un homme bon aurait sans doute prit la peine de la réconforter, de la rassurer. Mais il était son Instructeur avant tout. Que cela soit elle ou lui, aucun ne devait s’attendrir. La mission de reconnaissance de demain ne serait pas sans danger ; ils devaient rester concentrés au risque de commettre un faux pas mortel. Et puis… Cole scruta la silhouette de la jeune fille, toujours agenouillée près d’Alec. Il ne lui faisait toujours pas confiance.  

 

 

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