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Lalee

         Cole Turner ralentit l’allure à l’approche d’un pont abandonné. Il scruta les environs, s’assurant que personne ne les suivait et poussa cette fille qu’il avait fait prisonnière en début d’après-midi. Il ignorait son nom et peu lui importait. Pour lui, ce n’était qu’une Républicaine. Rien de plus. Il lui ordonna de descendre en contrebas afin de passer sous l’arche du pont. Il la titilla du canon de son Glock assez pour qu’elle lui décoche un regard noir par-dessus son épaule. Les longs cheveux auburn tombant sous ses omoplates s’agitèrent à l’instar de son regard ambré qui flamboyait dans la pénombre comme deux flammes. La frêle silhouette manqua de glisser mais Cole n’eut même pas le reflexe de chercher à l’aider dans son équilibre. Si elle se brisait le cou dans une chute, il n’aurait aucune mauvaise conscience. Il l’entendit pousser un juron peu élégant venant de la bouche d’une femme, aussi jeune qui plus est. Il glissa le long de la pente avec souplesse, sans cesser de la mettre en joue.

 

  • Sous le pont., lança-t-il à l’intention de la fille.

 

Sans un mot, elle s’exécuta. Cole remarqua le léger frisson sur les épaules nues de sa prisonnière lorsqu’une brise fraiche finit par se lever. Il n’en avait cure. Turner finit par la faire s’assoir contre la paroi du pont et s’installa à son tour bien en face de la jeune fille. Avant, il prit soin d’attacher une corde à la cheville de celle-ci dont il fit un autre nœud à la dernière extrémité autour de son propre poignet. Elle n’aurait ainsi donc aucune chance de prendre la fuite sauf si elle s’entêtait à ronger la corde avec ses dents. La républicaine suivit son manège d’un œil furibond, mâchoire serrée. S’apercevant très certainement qu’il s’en fichait comme d’une guigne alors qu’il sortait un fruit de son sac, elle tira d’un geste sec sur la corde.

 

  • C’est quoi ça ?, fulmina-t-elle.

  • Une corde.

  • Tu me prends pour un animal ?

 

Il leva les yeux une seconde, munis d’un rictus :

 

  • Un chien. Un molosse de la République. C’est une raison suffisante.

 

La jeune fille soupira avec véhémence :

 

  • Combien de fois dois-je te le dire ! Je ne suis pas Républicaine !

  • Bien sûr. Et moi, je suis le Chef Suprême en personne !

 

Exaspérée, elle tira de nouveau sur la corde assez bien pour manquer de lui faire lâcher son orange qu’il s’attelait à dépecer. Très lentement, il releva la tête vers elle, ancrant ses prunelles dans celles de sa prisonnière. Immobile, comme un lion prêt à bondir sur sa proie, il articula soigneusement ses mots :

 

  • Estime-toi heureuse de n’avoir qu’une corde. La prochaine fois que tu refais ça, je te scie la jambe. Tu m’as bien compris ?

 

Elle poussa un hoquet indigné. Si elle n’avait pas les mains attachées, elle aurait sans doute croisé les bras comme une enfant boudeuse. Les billes d’ambre glissèrent sur le cou de Cole puis vers son épaule. Turner serra les dents. Il savait très bien ce qu’elle regardait. Il avait bien conscience de l’horrible brûlure partant de la naissance de son épaule jusqu’à son cou. Subtilement, il se détourna, s’ôtant de sa vue.

 

  • Où m’emmènes-tu ?, finit-elle par s’enquérir.

  • Quelque part.

  • J’ai le droit de savoir !

  • Non. Tu suis et tu la fermes.

 

Que croyait-elle ? Qu’il suffisait de demander gentiment pour qu’on lui réponde sans aucune hésitation ? Les Républicains étaient décidément des idiots, pourris jusqu’à la moelle. Le silence finit pas s’installer au point qu’il aperçut la Républicaine somnoler. La nuit tombait. Cole se demanda combien des siens elle avait bien pu assassiner pour ressentir une telle fatigue ; sûrement beaucoup – trop. Au bout d’une heure, il ressentit lui aussi les effets du sommeil. Il s’assura une dernière fois que la corde était bien accrochée avant de croiser les bras pour se reposer un peu. Ce n’est qu’au milieu de la nuit que ses sens se mirent en éveil tandis qu’il sentit la corde gagner du mou. Cole ouvrit rapidement les yeux et trouva la Républicaine à quelques centimètres de lui, en suspension au-dessus de son sac où se trouvait son arme de poing. Vif, il lui saisit le poignet qu’il tordit en l’obligeant à reculer. Elle poussa un cri, se cambrant sous la prise.

 

  • Tu es décidé à crever, toi !, rugit-il.

 

Prit dans sa colère, il se saisit de son Glock qu’il pointa droit sur elle. Aussitôt, la jeune fille se roula en boule dans un gémissement apeuré. Quelle comédienne ! Cole aurait rit si la fureur ne l’embrasait pas. Cependant, il ne devait pas l’abattre. Elle restait une prise trop précieuse pour la laisser se vider de son sang. Il devait l’emmener avec lui, bien qu’il lui en coûte de partager le même air qu’un résidu de la République.

 

  • Tant pis pour ta nuit de repos, ma grande., siffla-t-il, Maintenant que tu es réveillée, on reprend la route.

 

La malheureuse le dévisagea, mitigée entre son incompréhension et son soulagement.

 

  • Pourquoi ne pas me tuer ?, balbutia-t-elle, tendue.

  • Comme je te l’ai dis, ce n’est pas l’envie qui me manque., répondit-il en basculant son sac sur son épaule.

 

Lorsqu’il s’avança pour la délier de la corde, toujours furieux, elle recula d’appréhension. Il tira sur le lien, manquant de lui faire perdre l’équilibre afin qu’elle reste là où elle était. Même avec ce geste d’avertissement, elle fit de nouveau quelques pas en arrière à son approche. La Républicaine semblait au bord de la crise de nerfs :

 

  • Mais qu’est-ce que tu vas faire de moi !, cria-t-elle, Je n’ai rien fais ! Absolument rien ! Je ne comprends pas ce que tu me veux ! Laisse-moi partir ! Laisse-moi ! (Elle continuait de hurler et reculer tandis que Cole ne se laissait pas démonter, s’approchant encore et encore) Je t’en prie ! Je veux juste partir loin d’ici ! Je veux juste retrouver ma sÅ“ur !

 

Cette fois, Turner arrêta son bras à quelques centimètres du visage de la fille, ruisselant de larmes. Tout ce corps frêle tremblait de peur, d’envie de fuir … et d’une volonté nouvelle. Elle-même semblait surprise de ses propres mots, comme si c’était la première fois qu’elle les formulait à voix haute.

 

  • Je veux retrouver ma sÅ“ur…, souffla-t-elle comme pour elle-même.

 

Elle le répéta une seconde fois, semblant se ragaillardir au simple son de sa formulation. Puis, elle affronta Cole, tête haute :

 

  • Je veux la retrouver !

 

Elle fit un pas vers lui, poings serrés :

 

  • Je veux retrouver ma sÅ“ur que l’on m’a arraché !, s’époumona-t-elle.

 

Turner baissa sa main, comme s’il la découvrait pour la première fois. Indécis, il pencha la tête sur le coté. Son hurlement avait paru monter dans les aigus comme si elle cherchait à le convaincre lui aussi de son objectif. A défaut de ne pas avoir la carrure de le mettre au sol, elle menait le combat en jouant sur la nuance du timbre de sa voix, sur ses mots, puisqu’il était vrai qu’elle n’avait rien d’un des fléaux de la République, se pavanant dans les rues en uniforme et rudement armés. Mais Turner resta buté. Le régime n’utilisait pas seulement des soldats pour abuser des bons citoyens. Qui sait quel rôle tenait cette fille au sein du Parti ? Elle pouvait très bien être une fille, une sÅ“ur, une cousine d’officiers, travaillant dans l’ombre en se cachant derrière son joli minois et sa silhouette incarnant l’innocence. Tout pour endormir la méfiance des hommes, sensibles aux minauderies. Et la Républicaine continuait de lâcher un flot de paroles, inventant une histoire sur sa famille tuée par la République et une sÅ“ur enlevée par les soldats du régime. Elle ne s’arrêtait plus, son regard s'écartant de lui comme si elle s’adressait à un point dans le vide, à coté de lui. Cole savait qu’il était plus facile de mentir en ne regardant pas son interlocuteur droit dans les yeux.

 

  • Comment peux-tu croire, après tout ce qu’ils m’ont fais, que je suis un soldat de la République ?, conclut-elle avec amertume, la voix enrouée pour marquer le chagrin.

  • Tu es forte, je l’admets., avoua lentement Turner, le regard froid, Vraiment. Il faut être vraiment rusée et avoir un esprit tordu pour inventer une telle histoire en quelques minutes. (Sa prisonnière ouvrit les yeux ronds, atterrée.) J’en ai vu des gens comme toi qui ont réussis à entourlouper des hommes bons. Trop bons. Mais ne pense pas que ce sera mon cas. Ceux qui se seront fais avoir avaient le cÅ“ur bien placé bien que leur raison fut trompée. Pas moi. Tu ne m’auras pas.

  • Ouvre les yeux, bon sang !, insista la jeune fille, Regarde-moi !

  • Je sais ce que j’ai vu.

  • Tu en as conclu ce que tu voulais ! Rien de plus ! Tu ne cherches même pas à m’écouter, à comprendre ce qui s’est passé ! J’ai tué un soldat ! Pourquoi l’aurai-je fais si j’étais des leurs !

 

Accompagnant les gestes à la parole, elle leva les mains devant les yeux de Cole, paumes ouvertes.

 

  • J’ai encore son sang sur les mains ! Regarde !

 

Mais il n’y avait rien. Cette fille dépassait les bornes. Brusquement, il enfonça ses doigts autour de sa gorge, la plaquant contre le mur.

 

  • Je n’ai aucune patience., prévint-t-il avec colère, Aucune. Prends-moi encore pour un con et tu le regretteras.

  • Tu ne peux pas me tuer !, rétorqua la jeune fille.

  • Le principal est que tu sois en vie. En bon état ou non n’a aucune importance.

 

La fille pinça les lèvres, enroulant ses doigts autour du poignet menaçant.

 

  • Tu hais la République mais tu ne vaux pas mieux., persifla-t-elle, T’en prendre à une fille sans défense en lui donnant tous les torts du monde est ta seule excuse pour justifier ta lâcheté.

 

Ce coup-ci, l’impact de l’insulte se lut dans le regard bleu de Cole. Il se faisait violence pour ne pas céder à la provocation, jugulant sa haine, toute sa rage. Il lâcha le cou menue et, sans un mot, la poussa en avant. Il n’avait aucune envie de répondre au risque de sortir de ses gonds et de commettre l’irréparable. Pour l’heure, il devait la mener à bon port. Une fois qu’elle serait hors de sa vue, il irait beaucoup mieux.

 

                Lalee sentait la lourdeur de ses jambes, de ses bras tandis qu’elle avançait devant son geôlier. L’aurore se levait à l’Ouest. Elle n’avait pas dormis de la nuit, ni avant ni après son altercation avec cet homme si borné. A son inverse, il ne semblait pas ressentir la moindre fatigue, imperturbable. Aux abords de ce qui ressemblait à un parc fournis en arbres, qui prenait tout l’air d’une forêt, il l’arrêta net. Sans cérémonie, il lui banda les yeux d’un foulard noir qu’il serra avec violence. Il n’avait pas dis un seul mot de plus depuis qu’elle l’ait ouvertement défié, mais sa rancune transparaissait par ses gestes. Il la saisit par le bras. A son contact, ‘Lee se crispa mais se refusa de tenter de se dégager au risque d’envenimer la situation déjà tendue. Il la guida durant des minutes lui paraissant interminables. La jeune fille butait contre des racines, des blocs de pierre. La main sur son bras lui permettait de ne pas tomber tête la première. Enfin, il la stoppa de nouveau et lui ôta le foulard en ne manquant pas de lui tirer les cheveux. Lalee fut convaincue qu’il le fit exprès. Elle cilla un moment, osant regarder les alentours. C’était des ruines, sûrement d’une ancienne bibliothèque ou d’un musée. Il n’en restait que des fondations disloquées, recouvertes de mousses et de racines. Le jeune homme poussa du pied un amas de verdure et en découvrit une trappe qu’il ouvrit. ‘Lee fronça les sourcils, perplexe.

 

                Où ça mène ? Qu’est-ce que cache cette trappe ?

 

L’inconnu sortit le couteau qu’il lui avait volé et s’avança vers elle. Lalee frémit, inquiète de ce qu’il avait l’intention de lui faire. Lui couper la langue ? Lui trancher un bras, une jambe ? Son appréhension se dissous aussitôt lorsque la lame coupa net le Serflex liant les poignets de la jeune fille.

 

  • Je suis libre ?, tenta-t-elle, emplit d’espoir.

  • Non. Descends en premier., coupa-t-il.

 

La jeune fille jeta un coup d’œil dans la trappe. L’ouverture était sombre et n’augurait rien de bon. Il la bouscula légèrement, l’incitant à poser un pied sur le premier barreau d’une échelle bancale. Elle avait dut servir de nombreuses fois pour être aussi usée. Se raccrochant soigneusement, évitant tout faux mouvement, Lalee descendit, bientôt suivis du jeune homme. Elle soupira de soulagement lorsqu’elle arriva au bas de l’échelle et que sa semelle retrouva le contact rassurant du sol. Son geôlier, une fois qu’elle fut pour de bon descendue, sauta souplement près d’elle, malgré les nombreux échelons restant. D’un mouvement de son arme, il ordonna à la jeune fille d’avancer dans le tunnel s’ouvrant à eux. D’un pas hésitant, elle lui obéit, guettant toutefois le pas derrière elle. Elle n’aurait jamais cru compter sur la présence de cet inconnu violent et désagréable pour se rassurer dans un tel endroit. Le tunnel dans lequel ils déambulèrent avait une infrastructure solide et renforcé à l’image des bunkers. Parmi les quelques livres qu’avaient réussis à dénicher son père, certains relataient l’histoire des anciennes guerres. Trop jeune, et peu intéressée, Lalee ne les avait feuilletés que pour en découvrir les photos et lire les légendes en-dessous. Elle en avait gardé les souvenirs. Ainsi donc, ce rustre l’emmenait dans les profondeurs d’un bunker ? Une cachette… Pour qui ? Pour lui ? ‘Lee aurait aimé poser des questions mais celui qui l’accompagnait semblait plus tendu et nerveux. Quand bien même, il n’aurait pas été enclin à lui répondre. Le long couloir descendit soudain, et leur offrit un ascenseur rouillé. Là, Lalee se braqua.

 

  • Hors de question que je monte là-dedans !, dit-elle.

  • Tu n’as pas le choix. Dépêche-toi.

 

L’échelle avait déjà été une épreuve mais ‘Lee ne souhaitait certainement pas perdre la vie aussi bêtement, écrasée par un ascenseur pareil. L’homme à coté d’elle soupira d’impatience :

 

  • Il est sûr. Je l’ai emprunté un millier de fois, et je ne suis pas le seul. Alors cesse tes jérémiades et entre là-dedans.

 

              « Pas le seul Â» ? Comment ça, « pas le seul Â» ? Il y’en a d’autres, des comme lui ? Aussi fous et bornés ?

 

Elle se garda bien de tout commentaire d’autant plus, qu’agacé, il la força à mettre un pied dans la cage ferraillée. Il la suivit, refermant le pan dentelé métallique avec véhémence. L’ascenseur frémit en écho à Lalee qui se tendit au grincement inquiétant. Elle tituba lorsque la descente s’enclencha. Cela ne dura que quelques secondes. Stable, l’inconnu rouvrit la porte coulissante et reprit le bras de ‘Lee qui bondit avec joie hors de la cage. Elle faillit percuter une cloison dans son empressement. Cela avait tout l’air d’un cul-de-sac avant que l’inconnu ne fit pression sur l’un des pans qui frémit avant de s’ouvrir. Alors, un brouhaha intense vrilla les tympans de ‘Lee qui se boucha les oreilles. A sa grande surprise, le spectacle qui s’offrit à elle la laissa sans voix. Tout était illuminé de telle sorte qu’on eut l’impression de se trouver en plein jour. C’était une salle en alcôve si immense qu’elle en paraissait surréaliste. A plusieurs étages, elle s’ouvrait en plusieurs galeries, et des ascenseurs ainsi que des escaliers permettaient d’y accéder. Ce qui époustoufla Lalee ne fut pas cette structure impressionnante mais ceux qui y gambadaient librement. Des gens, comme elle, de tout âge, toute origine. Soudain, la jeune fille comprit.

 

                Une ville. Je suis tombée dans une véritable ville sous-terraine…

 

Certaines personnes passaient devant elle sans les voir, armés jusqu’aux dents dans des vêtements usés parfois noircis. D’autres encore vaquaient à leurs occupations, feignant une vie habituelle. Des enfants jouaient dans la Grande Salle sous l’œil attentif de leurs mères en train de converser près d’eux. En reniflant l’air ambiance, ‘Lee décela une odeur propre aux cuisines sur la droite. Elle marmonna des mots inaudibles, bien trop dubitative devant un tel spectacle. Le jeune homme ne lui laissa pas le temps de mieux détailler l’endroit, lui reprenant le coude d’une prise ferme. Ils traversèrent le rez-de-chaussée, Lalee regardant de droite à gauche avec une curiosité presque enfantine. Elle était émerveillée. Des personnes finirent par remarquer leur présence, saluant l’inconnu avec respect et sourire avant de prendre une mine déconfite en apercevant la jeune fille à ses cotés. Bientôt, leur arrivée parut faire le tour des présents. Une voix s’éleva dans la foule.

 

  • Cole ! Hé ! Cole !

​

Lalee haussa un sourcil, dévisageant son geôlier qui parut réagir à l’appel. Il s’appelait donc Cole ? Un adolescent sortit de la foule en jouant des coudes avant de se jeter à leur encontre, d’une façon presque ridicule. Essoufflé, il resta courbé un moment prenant de grandes inspirations. Enfin, il se redressa brusquement, fringuant.

 

  • Yep !, lança-t-il comme si de rien n’était.

 

Il arbora un immense sourire en tapotant l’épaule de Cole. ‘Lee se tendit, attendant l’accès de colère de ce dernier qui ne vint pas.

 

  • Alors, frangin ? Tu en as mis du temps ! Je ne te savais pas aussi lent dans tes missions. Que nous as-tu trouvé ? A manger, j’espère ! J’ai envie d’une barre chocolatée. Tu as trouvé des barres chocolatées ? Sinon, des céréales m’auraient très bien convenu ? Tu en as trouvé aussi ?

 

               Frangin… ?

 

La jeune fille eut un léger hoquet de surprise. Elle les étudia tour à tour avec attention. A priori, ils n’avaient aucune ressemblance frappante. Rien que la carrure différait. Le nouveau venu, menu bien que beaucoup plus grand qu’elle, n’avait pas les muscles et le gabarit adulte, viril, de Cole. Il devait avoir aux environs de dix-sept ans, en âge où la carrure masculine commence à prendre de l’ampleur. Il détenait des joues agréablement rosées accentuant la douce chaleur dans son sourire. Son regard turquoise n’avait pas les nuances d’émeraude comme le plus âgé et encore moins sa froideur. Le seul rappel de leur soi-disant fraternité s’incarnait dans leur chevelure brune à tous les deux, d’une identique nuance aux reflets plus éclaircis. Cole avait la sienne plus longue, moins travaillée que l’adolescent qui les gardait plutôt court, en piques, rejetée en arrière par des lunettes… D’étranges lunettes qui titillèrent la curiosité de Lalee. Elles lui firent penser à celles de chimistes ou mécaniciens. Son père en avait eu des semblables lorsqu’il travaillait du cuivre ou des pièces de vieilles voitures. Interpellée par cet aspect vestimentaire, elle baissa les yeux sur ce qu’il portait : un t-shirt trop grand pour lui, sur un pantalon noir et d’énormes bottes. Par comparaison, elle tourna ensuite les yeux sur Cole, vêtu, quant à lui, d’un haut collant son torse bien fait, les manches d’une épaisse veste sombre ceinturant ses épais muscles, un jean gris sur des rangers. Ses vêtements restaient dépenaillés, tâchés, usés … significateurs d’un esprit aventureux, constamment en vadrouille. Oui, définitivement rien en commun mis à part le brun de leurs cheveux.

 

  • Skill…, murmura Cole en fronçant les sourcils, Tu me casses déjà les oreilles.

 

Le prénommé Skill feignit l’indignation :

 

  • Ne me parle pas comme ça devant tout le monde, roh ! Je risquerai de me sentir gêné.

  • Toi, gêné ?, répéta Cole en haussant les sourcils, Ce serait une première.  

  • Il y a une première fois à tout, n’est-ce pas ? Et je ne tiens pas à ce que ça soit aujourd’hui ! Je suis d’une bien belle humeur vu que je sais que tu as ramené quelque chose pour moi !

 

Le cadet tendit une main vers Cole, radieux. Ce dernier secoua la tête, exaspéré. Lalee crut une seconde que Skill repartirait bredouille au lieu de quoi l’ainé farfouilla dans son sac à dos et tendit une friandise joliment empaquetée dans son emballage bleu. Heureux comme un pape, Skill la lui arracha pratiquement des mains, s’attelant à déballer le chocolat. ‘Lee tourna son attention vers Cole, sceptique. Un sourire effleura les lèvres de la jeune fille lorsqu’elle lut la tendresse dans le regard qui lui vouait un mépris sans bornes. Une tendresse qu’elle-même ressentait pour sa propre petite sÅ“ur, Sonnie. A son souvenir, son cÅ“ur se serra. Skill mordit avec ferveur dans la barre chocolatée avant d’enfin remarquer la présence de Lalee sous le joug de son frère. Il mâcha plus lentement, comme songeur. Une fois qu’il eut avalé, il s’adressa à elle, sans se départir de son ton guilleret :

 

  • Tu es nouvelle ?

 

‘Lee ouvrit la bouche pour lui répondre mais fut rapidement devancée par Cole qui resserra ses doigts autour de son bras. Elle grimaça.

 

  • Non. Loin de là., fit-il froidement, Je l’emmène en cellule.

  • Cellule de quoi ?, s’étonna Skill, Il y a encore des lits dispos dans les dortoirs.

  • Elle sera parquée avec les autres de son espèce.

  • Pourquoi ? Elle vient d’où ? Pluton ?

  • C’est une républicaine.

 

Il y eut un silence. Un lourd et pesant silence. Skill dévisagea durement son frère avant de reposer les yeux sur la soi-disante républicaine. Son regard la transperça. Curieux venant d’yeux aussi juvéniles et beaux. Lalee retint son souffle, attendant les insultes et la colère. Soudain, sans crier gare, Skill éclata de rire à gorge déployée faisant sursauter la jeune fille. Tant et si bien que certaines personnes se tournèrent vers eux, interloqués. S’il s’était roulé par terre, personne ne s’en serait étonné. Ils attendirent que son fou rire s’estompe bien qu’il parut ne jamais en finir. Il en pleurait, les joues empourprées.

 

  • Elle ? Républicaine ?, réussit-il à articuler entre deux gloussements, Non, mais tu déconnes ?

 

Au regard dur de Cole, il recouvra son sérieux. Skill pointa du doigt ‘Lee.

 

  • Mais t’es pas sérieux, quand même ? Ce n’est pas une mauvaise blague ?

  • Je n’ai pas de doutes.

 

Le cadet désigna l’ensemble de Lalee, comme si elle était une évidence à elle seule.

 

  • Même moi je fais plus républicain qu’elle !

  • Dieu soit loué ! Enfin !, s’exclama ‘Lee.

 

Les mots lui avaient échappé tant le soulagement était suprême. Quelqu’un faisait enfin preuve de bon sens et plaider son innocence… Bien que la manière reste atypique. Son exclamation lui valut un regard noir de Cole et l’amusement de Skill. Lalee offrit à ce dernier tout l’élan de sa gratitude d’un simple regard.

 

  • Ne te fais pas avoir., répliqua finalement Cole, Elle a tout contre elle.

  • Comme ?, nargua Skill, Elle était avec son unité de gros méchants, un Bionique dans son sillage ? Oh, non ! Laisse-moi deviner ! Elle portait un fusil, le treillis, et le béret d’infanterie ! A moins qu’elle ne soit parachutiste ? Elle s’est défendue comme une tigresse, en déployant ses compétences de Krav Maga ? (Il la détailla de nouveau) Même si je pense qu’elle serait plus une adepte de boxe… Ils font de la boxe dans l’armée ? Je ne pense pas qu’ils font de la boxe. Non, c’est trop gentil comme art de combat au vu de l’impitoyable manie qu’ils ont de décimer tout le monde sur leur passage. Quoiqu’elle se serait fait casser en deux durant les entrainements…

  • Hé !, s’insurgea Lalee mi-amusée mi-vexée.

 

Pourtant, il continua de déverser un flot de paroles, entrecoupé par ses déglutitions puisqu’il n’était pas décidé à abandonner sa barre chocolatée. Plus il parlait et plus son ainé perdait de l’assurance. Skill réussissait à le faire douter de lui. Lalee était seule lorsqu’il l’avait découverte, dormant dehors, sans aucune unité de patrouille avec pour seule pièce d’uniforme un veston aux tâches de sang séché. Cole ouvrait-il enfin les yeux ? Agacé, et sans doute prit en faute en public, l’ainé plaqua une main sur la bouche du bavard :

 

  • Je dois l’amener dans une cellule avant de me rendre au Comité. Tu seras gentil d’aller piailler ailleurs.

  • Mais ne la fous pas en Prison, la pauvre bichonne !, s’écria Skill, outré après s’être dégagé.

 

Lalee prit un air courroucé à cette appellation.  

 

  • Bichonne ? Je ne suis pas une bichonne !, s’offusqua-t-elle ouvertement, Ne crois pas que je sois sans défense !

 

Skill leva les sourcils, passant du visage vexé à la main de Cole la tenant en respect. L’adolescent haussa les épaules avant de se tourner vers Cole, comme en confidence :

 

  • Je l’aime bien.

  • Bon, écartes-toi. Je l’embarque., soupira l’ainé.

  • Taratata !, s’interposa Skill.

 

Il saisit l’autre bras de Lalee pour la tirer vers lui.

 

  • Hors de question que tu l’emmènes en cellule ! Elle n’est pas Républicaine, que Diable ! Elle ne mérite pas ça.

  • Tu n’en sais rien., objecta Cole en l’attirant de nouveau vers lui.

  • Si ! Je suis plus lucide que toi, il faut croire !

  • Tu n’étais pas là !

  • Et c’est bien dommage, je t’aurai évité de faire une telle bêtise !

  • Laisse-moi l’emmener dans une cellule !

  • Non !

  • Si !

  • J’ai dis non !

  • Stop !, cria Lalee, Je vais y aller dans cette cellule pourvu que vous me lâchiez !

 

Les cheveux ébouriffés, la jeune fille se débattit pour se dégager de la prise de Skill qui abdiqua à l’inverse de son frère. L’échange leur avait sans doute parut innocent mais ce n’était pas le cas pour ‘Lee qui fut tout du long tirée de droite à gauche comme une poupée de chiffon. La poigne de Cole était douloureuse ; elle en garderait certainement un bleu. Skill leva les bras en guise d’excuses. Sur ces mots, Cole poussa Lalee, pressée d’être enfin soulagée de sa présence. L’adolescent leur emboita le pas, ses lourdes bottes fracassant le sol de sa marche joviale. 

 

  • Où sommes-nous ?, finit par demander ‘Lee, toujours émerveillée par les infrastructures et la vie fertile qui s’y trouvait.

  • Tu n’as pas à le savoir., répondit Cole.

  • Au QG de la Résistance., fit Skill derrière eux.

 

Le bourreau de Lalee fit volte-face, prêt à sermonner son petit frère qui avait déjà prit de l’avance devant eux.

 

  • La Résistance ?, répéta la jeune fille.

 

L’idéal de son père. Un groupuscule appelant au combat pour s’affranchir d’une liberté mensongère.

 

  • Tu devrais aussi lui dire tout le fonctionnement du QG tant que tu y es !, fulmina Cole.

  • Oh, je peux ? C’est tout simple, à droite, tu as…

  • La ferme, Skill…

 

Pourtant, le jeune homme ne réussit pas à faire taire son frère qui parla plus fort et plus vite. Lalee tendit l’oreille, assez pour ne plus entendre Cole ; seulement l’adolescent.

                Le QG ne comportait pas tous les membres de la Résistance, loin de là. Seulement les plus fervents et précieux ainsi que leurs familles. Une place au sein du QG devait se mériter … et se garder. Il arrivait qu’il y ait une fluctuation plus dense mais temporaire lorsque le Mouvement préparait un gros coup et devait faire appel à des réseaux plus lointains français ou étrangers. Cette explication valut une mine atterrée de Cole mais Skill l’ignora. La fameuse Grande Salle était la plateforme de toutes les galeries ; elle servait pour tout : réunion pour les grands discours ou les informations, échanges et arrivages d’armements parfois de véhicules venant d’une bouche à cet effet. Parfois, comme de grandes portes ouvertes, le QG mettait en place un marché noir une fois par mois pour ravitailler les autres branches de la Résistance : nourriture, médicaments, vêtements. L’adolescent expliqua toutefois que cette Salle n’était rien comparée à toutes les ouvertures, tunnels et couloirs du QG. Tout était répartis en secteurs : dortoirs, armurerie, réserves, explosifs, salles d’entrainement, cuisines, réfectoire, prison, aile médical et une qu’il appela avec dépit « gouvernemental Â». Mais il ne s’étala pas sur ce dernier point comme s’il préférait tout simplement ne pas l’aborder.

 

                Un terrain dangereux, sûrement…

 

Ils empruntèrent un ascenseur bon grès mal grés pour Lalee. Là encore, Skill déblatéra sur le premier et second étage, glorifiant l’architecture restant maussade bien qu’impressionnante. Le premier étage était celui réservé aux dortoirs, ne comportant pas les appartements des hauts dignitaires de la Coalition. Au second, là où ils se rendaient, se trouvait la Prison réservée aux traitres du mouvement ou aux soldats, officiers, scientifiques, capturés pendant des interventions. Les portes de l’ascenseur s’ouvrirent et ils sortirent, Cole plus rapide, empressé d’en finir. Lalee n’eut le temps de ne rien voir, emportée par le pas vif du jeune homme. Même Skill peinait à les suivre, désormais. C’est de but en blanc qu’elle fut jetée dans cette fameuse cellule, ironiquement identique à celles de la République, lui sembla-t-il. Cole enclencha le verrou, montra bien en évidence la clé sous les yeux de son cadet avant qu’il ne la glisse dans sa poche.

 

  • Pas de conneries, Skill.

  • Toi non plus.

Cole l’interrogea du regard.

 

  • Réfléchis bien., ajouta son frère, Le Comité n’aura qu’un premier son de cloche qui sera le tien. Ne te laisse pas abuser par ta haine.

 

L’ainé ne répondit pas, se contentant d’acquiescer. Sans un regard vers Lalee, il tourna les talons pour rebrousser chemin. Son départ parut satisfaire Skill qui s’accrocha aux barreaux comme un singe. ‘Lee aurait rit si elle ne se trouvait pas dans une Prison, dans un endroit qu’elle ne connaissait pas après avoir passé vingt-quatre heures avec un mufle.

 

  • C’est quoi ton petit nom ?, s’enquit-il tout sourire.

  • Lalee., répondit l’intéressée après hésitation.

  • Lalee…, répéta Skill, Peu commun… Voire, unique. (Il colla son visage aux barreaux) Ne tiens pas rigueur à mon frangin. C’est un bourru mais il n’est pas méchant. Il a eu la vision altérée et s’en est prit à toi. Je ne lui cherche pas d’excuses… Mais il mérite qu’on lui accorde une seconde chance.

  • Vraiment ?, pouffa dédaigneusement ‘Lee, Après qu’il ait faillis me noyer, menacer d’un couteau, d’une arme et traiter comme un animal ? Non, aucune raison de lui en vouloir, vraiment.

 

L’adolescent eut un sourire contrit :

 

  • Il n’y va jamais par quatre chemins, je l’avoue.

 

Lalee hocha la tête en guise de confirmation. Elle se frotta les bras, hésitant à poser la question qui la taraudait depuis deux jours. Elle devait savoir, malgré tout.

 

  • Que vont-ils faire de moi ?

 

Skill esquissa une moue :

 

  • Nous le saurons au retour de Cole., lui confia-t-il, Au mieux, ils comprendront que tu n’es pas Républicaine… Dans le pire des cas, tu ne sortiras jamais d’ici : d’une part, parce que tu serais considérée comme une ennemie et d’une autre, tu en as trop vu rien qu’en posant un pied ici.

  • Ils ne me tueront pas, hein ?

  • Non. Nous valons mieux que ça, rétorqua avec conviction l’adolescent. Pour l’heure, tu as le temps de te reposer. Tu en as besoin, ça se voit.


C’était vrai. La jeune fille ressentit tout le contrecoup de ses récentes émotions. Bien que cela reste impromptu, enfermée dans cette cage, elle pourrait dormir à poings fermés sans craindre de se faire débusquer ou dépouiller. Skill prit congés, lui promettant de revenir la voir un peu plus tard. Une fois seule, ‘Lee se laissa choir sur le matelas d’appoint et s’endormit une fois la tête posée sur l’oreiller miteux.

 

                Des cris résonnaient au travers de flammes. Violentes, enragées. Comme le vortex de sentiments qui la rongeait. Elles dévoraient une partie d’elle : son honneur, son humanité. On l’appelait, la suppliait. Elle était impuissante. Elle avait beau courir, se démener, affronter le mur de flammes jusqu’à s’en brûler la chaire, elle ne pouvait rejoindre les appels au secoure. Puis, vint des rires moqueurs. Elle se retrouva plaquée au sol, meurtrie par les coups qu’on lui infligeait avant qu’une brique ne se dirige droit vers elle. L’impact la plongea dans un trou noir où elle semblait barboter. Se laissant dériver, elle ne sentit que trop tard l’eau sombre devenir bouillante. Des visages qu’il lui était bien connu éclaircir l’obscurité. Ses parents l’appelaient par son nom, leur visage chaleureux se muant soudainement en masque hideux jusqu’à laisser apparaître celui de Sonnie, en larmes. Sauve-moi. Elle réagit, forçant ses muscles à sortir de l’eau qui lui calcinait la peau. La sauver ; elle devait la sauver. Sa main se dirigea vers le visage poupon aux yeux ambrés, comme les siens. Mais il s’éloigna. Plus la distance était grande, plus les hurlements se firent lancinants, terribles à lui en écorcher le cÅ“ur. L’eau la happa brusquement. Elle se noyait ; elle ne pouvait remonter à la surface. Culpabilité.

 

                Lalee se réveilla en sursaut, moite. Encore ses cauchemars… Encore ce rappel douloureux de son incapacité à protéger Sonnie, à sauver les siens. Une incapable, voilà ce qu’elle était. Elle passa ses mains dans ses cheveux humides, finissant par sentir une présence derrière les barreaux de sa cellule. Elle se tendit, prête à hurler si on s’en prenait à elle. Mais qui viendrait pour l’aider ? Personne ; pas ici. Les yeux bleus suintaient dans la pénombre. Etant donné qu’elle était réveillée, il s’approcha, s’offrant à la lumière d’un néon. Cole avait les bras croisé, songeur. Lalee manqua un souffle, craignant qu’il ne s’en prenne de nouveau à elle. Seulement, lorsqu’il lui parla, il n’avait plus ce ton accusateur et méprisant, mais une curiosité sincère :

 

  • Qui est Sonnie ?

 

A l’entendre prononcer son nom et le cauchemar encore à vif dans son esprit, ‘Lee eut les larmes aux yeux mais elle refusa de sangloter devant cet homme.

 

  • Ma petite sÅ“ur., avoua-t-elle.

 

Cole pencha la tête :

 

  • Celle que tu veux retrouver., se souvint-il.  

 

Elle acquiesça.

 

  • Et que lui est-il arrivé ?

  • On me l’a… arraché.

 

La jeune fille cracha son dernier mot, avec toute la rage qu’il lui inspirait.

 

  • Ils m’ont tout pris…, continua-t-elle, Absolument tout. La République, ses partisans… C’est à cause d’eux que je suis ici… Ils m’ont enlevé ma sÅ“ur.

  • La République nous prend à tous, un jour ou l’autre, ce à quoi nous tenons le plus.

 

A sa façon de prononcer ce fait, Lalee comprit que Cole, ce rustre et borné Cole, avait lui aussi perdu beaucoup. C’est sans doute pourquoi Skill lui avait demandé d’être souple dans son jugement, de ne pas s’arrêter à ce qu’il lui avait fait voir. Tout comme lui, sans doute aurait-elle fait parler sa rage avant la raison. Elle l’ignorait ne s’étant jamais trouvée dans une telle situation qui lui aurait permis de se venger, d’une façon ou d’une autre.

 

  • J’ai parlé… Dans mon sommeil, c’est ça ?, hasarda-t-elle.

  • Tes cris s’entendaient jusqu’à l’autre bout du couloir., précisa-t-il, laconique.

  • Je suis désolée…

 

Il garda le silence, dardant son regard sur elle sans gêne. Lalee se sentit épiée, dépecée sous son poids. Cole finit par fouiller dans sa poche, sortant la clé qu’il inséra dans la serrure. ‘Lee se recroquevilla. Allait-il la punir parce qu’elle avait été trop bruyante ?  

 

  • Le Comité et moi-même avons conclu ton innocence après un long débat., déclara-t-il en tournant la clé, J’ai fais une erreur ; j’aurai dû être moins…

  • Con ?

 

Cole leva les yeux vers elle, de la même façon que lorsqu’il l’avait menacé de lui scier une jambe. Il passa toutefois outre et continua :

 

  • Ta liberté a un prix. Tu ne peux pas sortir d’ici au risque de mettre en péril notre position si jamais il te vient à l’idée d’être un peu trop bavarde avec des soldats.

  • Quel est ce prix ?, s’impatienta ‘Lee, agacée qu’il puisse penser qu’elle pouvait fricoter avec l’armée.

 

La porte de la cellule s’ouvrit, grinçante mais porteuse de liberté. Cole se tint sur le pas, gardant une main sur l’un des barreaux. Il avait reprit sa stature intimidante et dégagée, dominant Lalee de toute sa hauteur.

 

  • Devenir l’une des nôtres. 

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